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art conceptuel
21 mars 2008

Qu'est-ce que le lien social ?

Lien social

Delphine Desmulier

               

Civilité, sociabilité, solidarité

             

Que mettre derrière cette notion vague et inconsistante utilisée pourtant par tous les penseurs du social, qui ont d'ailleurs mis en avant la « dissolution » et la « crise » du lien social au cours des années 90 ? L'expression lien social désigne ce qui permet aux hommes de tenir ensemble et de vivre en société. Avant de devenir un objet d'interrogation pour les pères fondateurs de la sociologie, la réflexion sur le lien social et sur sa nature a été l'apanage des penseurs du contrat social, tels Thomas Hobbes, John Locke et bien sûr Jean-Jacques Rousseau, chacun d'entre eux cherchant à sa manière à rendre raison du « vivre ensemble ».

La sociologie a longtemps été marquée par l'opposition, systématisée par Ferdinand Tönnies, entre la communauté et la société : au lien communautaire, caractéristique de la communauté villageoise ou de la corporation de métiers, se substitue un lien sociétal fondé sur la dépersonnalisation des relations interindividuelles, la rationalité et le calcul. C'est ce lien sociétal qui caractériserait la vie dans la grande ville moderne et industrielle, telle que la percevait F. Tönnies, mais aussi Emile Durkheim et Max Weber. Or, derrière l'expression « lien social » se cachent des réalités multiples, qui dépassent et recouvrent l'opposition entre communauté et société. En témoignent les réponses diverses apportées par les sociologues à la question de la nature du lien social.

Le lien social peut, en premier lieu, être abordé sous un angle politique et moral et se décliner sous la forme des civilités, c'est-à-dire l'ensemble des liens unissant le citoyen à la collectivité. Ainsi, Norbert Elias s'est attaché à décrire le processus sociohistorique de « civilisation des moeurs » en Occident. Selon lui, on a assisté, depuis la Renaissance, à la codification des règles qui pèsent sur l'usage du corps, l'expression des émotions et des désirs et la satisfaction des besoins matériels. L'évolution des moeurs aboutit à une intériorisation croissante de ces normes. Les individus sont amenés à exercer un contrôle sur eux-mêmes si bien que l'on assiste à une canalisation de la violence. L'Etat s'approprie ainsi progressivement le monopole de la violence. Comment alors rendre compte de la montée des incivilités et de l'insécurité menaçant le lien social ? Il semble, en effet, que ce phénomène, mis en avant par les sociologues à partir des années 80, invalide la thèse de N. Elias. Faut-il considérer qu'il s'est trompé ? Ou faut-il voir dans la violence le seul fait des exclus d'une société aux moeurs pourtant policées et civilisées (David Lepoutre, Coeur de banlieue. Codes, rites et langages, 1997) ? Difficile de trancher...

Le lien social peut également être appréhendé sous l'angle des relations interindividuelles et prend alors la forme de ce que l'on appelle la sociabilité. Georg Simmel la définit comme « la base ludique de la socialisation » : elle correspond à l'ensemble des échanges d'un individu avec sa famille, ses amis, ses collègues de travail, ses voisins... Toutes ces relations constituent le « capital social » de l'individu que les sociologues s'attachent à mesurer par le biais d'enquêtes empiriques. Celles-ci montrent que le nombre et la nature des relations varient fortement selon l'âge, le sexe, le statut social et professionnel.

La notion de lien social recouvre enfin celle de solidarité. Pour le Durkheim de La Division du travail social (1893), les sociétés archaïques se caractérisent par une solidarité « mécanique » liant des individus indifférenciés et interchangeables ; en revanche, les sociétés modernes permettent, en particulier grâce à la division du travail, la différenciation des individus et l'émergence d'une solidarité « organique ». Sous quelle forme se décline alors la solidarité dans les sociétés contemporaines ? Celle-ci est présente à différentes échelles de la société. A l'échelle microsociale, on constate que la famille reste le lieu de l'entraide et de la solidarité intergénérationnelle, ceci en dépit de la déstabilisation de l'institution familiale. A l'échelle macrosociale, c'est l'Etat qui assure la mise en oeuvre des liens de solidarité par le biais de la protection sociale et de ce que l'on appelle plus généralement l'Etat providence.


source: http://www.scienceshumaines.com/-0alien-social-0a_fr_12697.html

             
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